UN SONGE
le laboureur m'a dit en songe : "Fais ton pain ;
Je ne te nourris pas ; gratte la terre et sème."
Le tisserand m'a dit : "Fais tes habits toi-même."
Et le maçon m'a dit : "Prends la truelle en main"
Et seul, abandonné de tout le genre humain,
Dont je traînais partout l'implacable anathème,
Quand j'implorais du ciel une pitié suprême,
Je trouvais des lions debout dans mon chemin.
J'ouvris les yeux, doutant si l'aube était réelle ;
De hardis compagnons sifflaient sur leur échelle,
Les métiers bourdonnaient, les champs étaient semés.
Je connus mon bonheur, et qu'au monde où nous sommes
Nul ne peut se vanter de se passer des hommes ;
Et depuis ce jour-là, je les ai tous aimés.
(Stances et poèmes, Les épreuves, 18865-1872
Sully Prudhomme (1839-1907)
J'espère que ce poème vous plaira, il est d'actualité je l'aime beaucoup
Je vous souhaite une bonne semaine avec mes douces pensées